Contrôles d'identité au faciès, enfin une étude scientifique.

Publié le par Vincent

Contrôles d'identité au faciès, enfin une étude scientifique.

 

Une grande étude scientifique menée par des équipes de chercheurs du CNRS met pour la première fois en France des chiffres sur l'impression largement partagée que les contrôles d'identité de routine sur la voie publique se font "au faciès", c'est-à-dire par ségrégation raciale, au lieu d'être fondés sur le comportement des intéressés, comme l'impose le droit.

 

Les personnes perçues comme "arabes" ont été contrôlées 7 fois plus que celles perçues comme "blanches" et les "noires" 11 fois. Dans 60% des cas l'individu contrôlé dit ignorer les raisons qui ont motivé l'intervention, dans les 40% restants les policiers ont donné une raison plus ou moins précise, genre "contrôle de routine". 76% des contrôlés ont jugé "neutre" le comportement des policiers mais tout de même 3% ont jugé avoir subi un traitement raciste ou insultant. Tout ceci étant résumé à l'extrême.

 

Le travail de terrain s'est fait sur cinq sites de la capitale entre octobre 2007 et mai 2008 sur une base de référence rigoureusement repérée de 37.833 personnes dont 58% de "blancs", 23% de "noirs" et 11% d' "arabes".

 

La préfecture de police de Paris a réagi à cette étude en saluant "des informations statistiques qui paraissent statistiquement incontestables" Elle reconnaît qu'il faudra "en tirer des enseignements" ce dont on est en droit de douter puisqu'elle suggère déjà que le ressenti des personnes contrôlées est faussé par "un manque d'explications".

On doit cependant reconnaître le chemin parcouru. "Vos papiers. Que faire face à la police?", ouvrage publié, en 2001, par le Syndicat de la magistrature se consacrait  aux contrôles d'identité. Une sorte de guide juridique sur la question. A la demande de certains syndicats de police, le ministre de l’époque, Daniel Vaillant, avait alors obtenu l’ouverture de poursuites pour "injure" et "complicité de diffamation envers une administration publique", en l’occurrence la police nationale.

 Une phrase de l’ouvrage y était particulièrement visée: "Les contrôles d’identité au faciès sont non seulement monnaie courante mais se multiplient."  Prolongée par Nicolas Sarkozy, devenu ministre de l’intérieur en 2002, la plainte avait prospéré jusqu’à la condamnation de tous les prévenus (auteur, éditeur et dessinateur de la couverture). Les condamnés avaient fini par être relaxés, en février 2009.

Ce qui n'empêche pas ce genre de contrôles de persévérer…  et, incidemment, les plaintes pour "outrage" de se multiplier, ce qui devient un problème pour la démocratie. (J'entends ce matin sur France Culture qu'une personne est poursuivie pour outrage après avoir simplement écrit, en bon citoyen, à son préfet au sujet des manières de sa police.


Vincent


Source: Mediapart 29.6.09: "Contrôle policier au faciès: la preuve scientifique",5 pages. Mediapart 4.7.09: "Contrôle au faciès, la réponse de la police",  4 pages.

En amont, l'étude du CNRS commandé par l'Open Society Institute "Police et minorités visibles, les contrôles d'identité à Paris", rapport de 80 pages

Publié dans Société

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